L'ouvrage que Mathieu Corteel présente en sous-titre comme une philosophie sceptique de l'intelligence artificielle a attiré mon attention : un bitcoineur est forcément un peu anarchiste, et le titre faisait trop écho à la célèbre formule d'Auguste Blanqui pour que je passe outre. Plus techno-curieux qu'autre chose, j'ai moins peur de la τέχνη que des technophiles immatures. Assuré par un interview* de l'auteur que je ne risquais pas de m'y exposer, pas plus que de m'infliger des rengaines technophobes, j'ai lu son livre qui ne traite pourtant ni de Bitcoin (quoique...**) ni d'uchronie, mais qui pouvait m'intéresser à ces deux égards.
Il commence cependant par des oracles apocalyptiques du jour (prochain) où les machines auront
codé et transcodé la culture dans sa totalité
, prophéties mâtinées de craintes inspirées des fantasmes transhumanistes de Nick Bostrom ou des singes dactylographes de Borel générant la bibliothèque-univers de Borgès et nous plantant là comme des idiots face à l'horizon de la doctrine humaine
de Leibnitz.
Tout ceci en nous prévenant qu'il ne faudra pas trop compter sur la bonne volonté des marchands d'IA : tout leur business model repose sur l'illusion
.
Loin des parousies techno-solutionnistes, l'auteur, philosophe et historien des sciences, chercheur associé à Harvard, annonce de façon délibérement sceptique l'inquiétante couleur de l'avenir : l'association entre les IA et les humains introduit une part de non-sens, d'absurde, d'illusion dans nos choix, jugements et agissements quotidiens sans qu'on s'en rende compte
.